Québec l’écureuil, Ottawa la cigale

Crise de la Covid-19 oblige, les gouvernements déversent des milliards de dollars en mesures extraordinaires: 27 milliards $ pour le fédéral, et 2,5 milliards $ pour le provincial.

On espère cependant que les gouvernements auront les poches suffisamment profondes pour supporter ces gargantuesques montants.

Comme je l’expliquais dans un précédent Blogue économique, cette crise économique en est une de liquidités. Avec l’arrêt des activités économiques, des milliers de travailleurs et d’entreprises ont perdu des revenus et n’arrivent pas à payer leurs dépenses courantes.

C’est pourquoi les gouvernements ont mis en place des programmes spéciaux, tant au fédéral qu’au provincial, afin de soutenir les individus et les PME pendant cette période de confinement, leur permettant de survivre financièrement.

Mais les gouvernements pourront-ils absorber à eux seuls l’incroyable choc économique de cette crise?

Pour analyser la situation, il faut d’abord comprendre la dynamique très révélatrice des déficits budgétaires.

Croissance économique = surplus

Depuis 2016, le Canada et le Québec connaissaient une forte croissance économique, avec une diminution historique des taux de chômage.

Situation économique avant la crise

Normalement, cette situation génère automatiquement des surplus budgétaires. Pourquoi?  C’est très simple.

D’abord, les dépenses publiques diminuent automatiquement en temps de croissance. Il y a moins de chômeurs, donc moins de dépenses en assurance-emploi, moins de pauvreté (les gens ont plus de revenus, ils retrouvent des contrats et des emplois), donc moins de dépenses sociales, etc.

Ensuite, les revenus des gouvernements augmentent automatiquement en temps de croissance. Comme les individus et les entreprises ont plus de revenus, il y a une augmentation des recettes d’impôts pour le gouvernement. Et avec davantage de revenus, les gens consomment plus, ce qui donne une augmentation des recettes de taxes (TPS, TVQ, etc.).

Donc, avec des dépenses à la baisse et recettes à la hausse, on devrait se diriger automatiquement vers un surplus budgétaire (Recettes > Dépenses). Cela n’a rien à voir avec la qualité de la gestion budgétaire du gouvernement. C’est tout simplement le résultat de la très bonne conjoncture économique.

C’est le cas à Québec, le gouvernement Legault s’étant retrouvé avec une belle cagnotte budgétaire. Il dispose donc de marges de manœuvre financières importantes pour affronter la crise.

Dans le graphique ci-dessous, on voit l’évolution des déficits publics. La Grande crise de 2009 a projeté tous les pays occidentaux dans le rouge. Puis la croissance économique est graduellement revenue,  et on voit alors le déficit se réduire constamment, pour ensuite se transformer en surplus dès 2014-2015.

En conséquence, la dette publique du Québec s’est stabilisée autour de 2017-2018.

C’est la recette magique d’une saine gestion budgétaire: en temps de crise, le gouvernement doit s’assurer de relancer l’économie, en multipliant les investissements et les dépenses. L’endettement augmente. Et quand la croissance économique revient, il en profite pour rembourser la précédente dette encourue avec les surplus générés.

Mais au fédéral, le gouvernement Trudeau multiplie les déficits depuis 2015, alors que la forte croissance économique aurait dû apporter des surplus. Conséquence : une augmentation importante de la dette publique du Canada.

Trudeau avait d’abord promis de « petits déficits ». Cela peut se justifier si l’entièreté de ce déficit est consacré essentiellement à des investissements long terme (éducation, innovation et recherche, infrastructures, transport en commun, transformation industrielle et environnementales, développement socio-économique, etc.). J’étais d’ailleurs d’accord avec cette stratégie en 2015, dans mon analyse économique des plateformes électorales.

Mais le gouvernement a plutôt accumulé de « gros » déficits. Plutôt que 10 milliards $, le graphique ci-dessus montre que, depuis 2016, les déficits sont de l’ordre de 16,8 à 23,1 milliards (à l’exception de 2018). Vous comprendrez qu’il faut avoir le pied très lourd sur la pédale des dépenses publiques pour faire de tels niveaux de déficit en temps de croissance économique!

A l’analyse des budgets de M. Morneau, je suis loin d’être certain que l’entièreté des déficits est consacrée uniquement à des investissements productifs. Ainsi, l’endettement se poursuit, et tout cela risque maintenant d’exploser avec les dépenses nécessaires pour lutter contre la crise de la Covid-19.

Vers une crise des finances publiques?

Car si la croissance économique apporte des surplus budgétaires, un grave ralentissement économique, tel celui que l’on vit actuellement, risque, à l’inverse, de créer une situation financière difficile pour les gouvernements.

Avec des milliers d’individus et d’entreprises subissant des baisses de revenus, on s’attend à une forte diminution des recettes d’impôts pour le gouvernement, ainsi que des recettes de taxes. Avec la hausse vertigineuse du taux de chômage, on aura aussi une forte augmentation des prestations d’assurance-emploi, ainsi que des dépenses sociales.

A tout cela s’ajoute les mesures économiques extraordinaires que les gouvernements ont mises en œuvre.

Les deux niveaux de gouvernements se dirigent vers de sérieux déficits budgétaires!

C’est un gros revirement de situation à Québec. Sauf que la Belle province, grâce à une gestion plus pragmatique du budget en période de vaches grasses, dispose des marges de manœuvre suffisantes pour absorber ce déficit.

Au fédéral, le gouvernement Trudeau s’est plutôt montré, disons, moins clairvoyant… Il aurait été peut-être plus sage de prévoir des surplus budgétaires dans les deux dernières années, alors que la conjoncture le permettait, afin de se donner les moyens financiers nécessaires pour affronter une éventuelle  tempête économique.

Pas de panique!

Ceci dit, le Canada a les moyens de ses ambitions budgétaires. L’endettement du gouvernement du Canada  se maintient à 30% en en pourcentage du PIB, malgré l’accumulation des déficits. Autrement dit, nous disposons de la richesse nécessaire (le PIB) pour payer nos dettes.

Et les taux d’intérêts n’ont jamais été aussi bas que maintenant. Le taux directeur de la Banque du Canada est descendu à 0.25%. Les gouvernements peuvent financer leurs déficits à un coût vraiment minime.

Conclusion : les deux niveaux de gouvernement ont tous les moyens financiers nécessaires pour répondre à la crise de la Covid-19. Cela va certes coûter très cher, avec une hausse de l’endettement public, mais les gouvernements peuvent le faire.

Ça va bien aller!

...

 

 

 

 

 

Complément d’information : La recette magique d’une saine gestion budgétaire 

Qu’est-ce qu’un solde budgétaire? C’est tout simplement la différence entre les revenus et les dépenses du gouvernement.  

  • Si positif (Recettes > Dépenses), on parle d’un surplus budgétaire
  • Si négatif (Recettes < Dépenses), on parle d’un déficit budgétaire
  • Si nul (Recettes = Dépenses), on est au « déficit zéro »

Lorsqu’un gouvernement dégage un déficit budgétaire, il faut alors qu’il emprunte de l’argent sur les marchés financiers pour lui permettre de dépenser plus que ce qu’il reçoit en revenus. La dette publique augmente.  

Au contraire, s’il fait un surplus budgétaire, il a de la marge de manœuvre pour soit pour investir ce surplus dans des investissements long terme (éducation, innovation, infrastructures, etc.), soit pour rembourser une partie de sa dette. La dette publique diminue alors.  

C’est la recette magique d’une saine gestion budgétaire : en temps de crise, le gouvernement doit s’assurer de relancer l’économie, en multipliant les investissements et les dépenses. L’endettement augmente. Et quand la croissance économique revient, il en profite pour rembourser la précédente dette encourue avec les surplus générés.

Covid-19 : Tableau complet des mesures d’aide économiques

Covid-19 : Tableau complet des mesures d’aide économiques (mise à jour)

Mise à jour (vendredi 24 avril 2020)

Résumé des mesures économiques in.dites des Gouvernements du Québec et du Canada contre la crise économique de la Covid-19.

Dans un récent Blogue économique, j’expliquais en quoi la crise actuelle ne ressemble en rien à une récession « normale ».  A la fois plus grave et plus aigüe qu’une crise économique standard, c’est une essentiellement une crise de liquidités

Elle appelle donc des mesures gouvernementales bien différentes, qui nous touchent toutes et tous, individus et entreprises.

Voici un résumé le tableau suivant de toutes les mesures gouvernementales, mise à jour au 2 avril 2020.

Note: toutes les mesures du gouvernement canadien sont précisées ici.

Mesures pour les individus

Allocations spéciales pour les gens qui restent à la maison, qui n’ont pas le droit à une assurance-emploi.  Rester en confinement chez soi signifie pour des milliers de personnes des pertes de revenus. Pour soutenir ces gens, afin qu’ils puissent avoir les liquidités nécessaires pour payer leurs factures et subvenir à leurs besoins.

Canada. Nouvelle prestation canadienne d’urgence (PCU). Prestation imposable de 2 000 $ par mois (500$ par semaine) pendant quatre mois au maximum. Tous les détails ici. S’adresse aux salariés, travailleurs contractuels et travailleurs autonomes qui ne seraient autrement pas admissibles à l’assurance-emploi. Pour  les personnes:

  • qui ont perdu leur emploi en raison de la COVID-19;
  • dont les heures de travail ont été réduites à zéro (travailleurs qui ont toujours un emploi, mais qui ne reçoivent aucun revenu en raison d’interruptions du travail causées par la COVID-19);
  • malade ou en quarantaine en raison de la COVID-19;
  • qui doivent s’absenter pour prendre soin d’autres personnes, parce qu’elles sont en quarantaine ou malades à cause de la COVID-19;
  • qui doivent s’absenter pour s’occuper d’enfants ou d’autres personnes à charge dont l’établissement de soins est fermé en raison de la COVID-19.

Admissibilité

  • de 15 ans ou plus qui résident au Canada;
  • qui ont arrêté de travailler en raison de la COVID-19 ou
  • qui sont admissibles aux prestations régulières ou de maladie de l’assurance-emploi;
  • ne pas avoir quitté volontairement son emploi;
  • qui ont gagné un revenu d’au moins 5 000 $ en 2019 ou dans les 12 mois précédant la date de leur demande.

Élargissement de l’admissibilité depuis le 15 avril :

  • Les personnes peuvent gagner jusqu’à 1 000 $ par mois pendant qu’ils reçoivent la PCU;
  • Extension aux travailleurs saisonniers ayant épuisé leur droit aux prestations régulières de l’assurance-emploi et qui ne peuvent travailler en raison de la COVID 19;
  • Travailleurs qui ont récemment épuisé leur droit aux prestations régulières de l’assurance-emploi et qui ne sont pas en mesure de trouver un emploi ou de retourner au travail en raison de la COVID-19;
  • permettre aux artistes de recevoir des redevances pour des œuvres sujettes au droit d’auteur produites avant le 1ermars pendant qu’ils reçoivent la PCU.

Si vous cherchez un emploi, mais que vous n’avez pas cessé de travailler à cause de la COVID-19, vous n’êtes pas admissible à la Prestation. 

Le revenu d’au moins 5000 $ peut provenir d’une seule ou de plusieurs de ces sources : revenu d’emploi, revenu de travail indépendant, prestations de congé de maternité ou de congé parental du régime d’assurance-emploi ou des prestations similaires versées au Québec dans le cadre du Régime québécois d’assurance parentale. 


Québec. Programme d’aide temporaire aux travailleurs (PATT COVID-19). PROGRAMME TERMINÉ.


Québec. Programme incitatif pour la rétention des travailleurs essentiels (PIRTE), qui offrira une prestation de 100 $ par semaine pour les salariés à faible revenu travaillant à temps plein ou à temps partiel dans les services essentiels. Cette compensation fera en sorte que les travailleurs à temps plein recevront un salaire supérieur à ce que leur procurerait la prestation canadienne d’urgence.


Canada. Baisse d’impôts. Baisse d’impôt immédiate d’au moins 580$ pour tout contribuable qui remplit une déclaration de revenu.


Québec et Canada. Report impôts. Report du paiement des impôts provincial et fédéral au 31 août. Pour plusieurs personnes, il s’agit de très gros montants d’argent qu’elles pourront utiliser à court terme comme liquidités.  + Date d’échéance de production des déclarations de revenus des particuliers repoussée au 1er juin 2020.


Canada. Hypothèques.

  • Souplesse pour le remboursement des hypothèques garanties par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL)
  • Les banques canadiennes se sont engagées à collaborer avec leurs clients, selon le principe du cas par cas, pour trouver des solutions.
  • Les assureurs hypothécaires du Canada s’engagent à fournir aux propriétaires des solutions.

Canada. Crédits et subvention. Bonification de programmes et de crédits d’impôt pour les particuliers, notamment :


Canada. Les Canadiens mis en quarantaine peuvent demander des prestations de maladie de l’assurance-emploi.


Canada. Pour les étudiants. Prestation canadienne d’urgence pour les étudiants (PCUE). Montant de 1 250 $ par mois aux étudiants admissibles ou 1 750 $ pour ceux aillant des personnes à charge ou un handicap.

  • Pour ceux qui ne sont pas admissibles à la Prestation canadienne d’urgence ou à l’assurance‑emploi, ou encore qui ne sont pas en mesure de travailler en raison de la COVID‑19;
  • disponible du mois de mai jusqu’au mois d’août 2020.

Canada. Pour les étudiants.

  • Financement de 116 000 emplois et stages cet été et au cours des prochains mois, au sein d’entreprises et organisations, afin d’aider les étudiants à trouver un emploi et à acquérir des compétences précieuses;
  • Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, qui aidera les étudiants à acquérir de l’expérience et des compétences précieuses en prêtant main‑forte à leur communauté durant la pandémie de COVID‑19. Jusqu’à 5 000 $ pour leurs études à l’automne.

Québec et Canada. Prêts et bourses étudiants.

  • Québec et Canada. Moratoire de 6 mois sur le remboursement des prêts étudiants
  • Canada. Doubler les Bourses d’études canadiennes pour tous les étudiants admissibles en 2020-2021, jusqu’à un montant de 6 000 $ pour ceux qui étudient à temps plein et jusqu’à 3 600 $ pour ceux qui étudient à temps partiel;
  • Canada. Élargir l’admissibilité à l’aide financière pour les étudiants en éliminant les contributions attendues des étudiants et des conjoints d’étudiants en 2020-2021;
  • Canada. Augmenter le montant hebdomadaire maximal pouvant être fourni à un étudiant en 2020-2021 de 210 $ à 350 $.

Canada. Retraites. Réduction de 25 % du retrait minimal exigé des fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR) pour 2020.


Mesures pour les entreprises et OSBL

Canada. Subvention salariale d’urgence du Canada. Couvre 75% des salaires des entreprises admissibles, jusqu’à concurrence de 847 $ par semaine par employé, pour une période pouvant aller jusqu’à 3 mois, rétroactif du 15 mars 2020. Une mesure de 71 milliards $ !

Admissibilité

  • Avoir subi une diminution dans leurs revenus bruts d’au moins 15 % en mars et de 30 % en avril et en mai;
  • Les employeurs de toutes tailles et de tous les secteurs seraient éligibles, incluant les organismes sans but lucratif et les organismes de bienfaisance enregistrés, mais à l’exception des entités du secteur public;
  • Les restaurants et les bars pourront aussi profiter de ce programme.

Détails

  • La part restante de 25% des salaires est à la charge des entreprises;
  • Basé sur combien les employés gagnaient par semaine avant le 15 mars;
  • L’Agence du revenu transférera par dépôt direct ou par chèque 75 % du salaire hebdomadaire;
  • jusqu’à un maximum de 847 $ par employé, somme qui doit être remis aux employés;
  • La subvention salariale doit servir à payer des salaires, et rien d’autre;
  • Rétroactif du 15 mars 2020;
  • En vigueur jusqu’au 6 juin 2020.

Cette subvention salariale vise à prévenir d’autres pertes d’emplois, à encourager les employeurs à réembaucher les travailleurs qu’ils ont dû mettre à pied à cause de la COVID-19, à maintenir un lien d’emploi avec eux et à aider les entreprises canadiennes et d’autres employeurs à mieux se positionner pour reprendre plus facilement leurs activités régulières après la crise. C’est aussi un moyen de verser plus rapidement des liquidités aux travailleurs sans emploi sans passer par le système bureaucratique du gouvernement. Plus d’information sur cette mesure.


Québec. Programme d’action concertée temporaire pour les entreprises (PACTE). L’aide financière, d’un montant minimal de 50 000 $, est attribuée sous forme de garantie de prêt, mais peut aussi prendre la forme d’un prêt, pour soutenir leur fonds de roulement afin qu’elles puissent poursuivre leurs activités. Les entreprises admissibles, incluant les coopératives, les OSBL et les entreprises d’économie sociale réalisant des activités commerciales, peuvent bénéficier d’un appui financier permettant de pallier le manque de liquidités lié à la COVID-19 en raison :

  • d’un problème d’approvisionnement en matières premières ou en produits (biens ou services);
  • d’une impossibilité ou d’une réduction substantielle de la capacité de livrer des produits (biens ou services) ou des marchandises.

Québec. Aide d’urgence aux petites et moyennes entreprises. Pour soutenir les PME qui éprouvent des difficultés financières en raison de la COVID-19 et qui ont besoin de liquidités d’un montant inférieur à 50 000 $ pour leur fonds de roulement. Pour les PME de tous les secteurs d’activité, y compris les coopératives, les organismes sans but lucratif et les entreprises d’économie sociale réalisant des activités commerciales.


Québec.  Programme actions concertées pour le maintien en emploi (PACME). Subventions pour aider les entreprises à couvrir les coûts des activités de formation ainsi que pour l’organisation du travail. Remboursement de  100 % des dépenses admissibles, jusqu’à concurrence de 100 000 dollars.

  • Les formations admissibles peuvent, entre autres, viser les compétences numériques relatives au télétravail, les bonnes pratiques liées aux enjeux sanitaires, la communication organisationnelle et l’amélioration du savoir-faire;
  • En vigueur maintenant et prendra fin le 30 septembre 2020;
  • Entreprises et organismes admissibles : entreprises ayant des salariés, les organismes sans but lucratif, les organismes communautaires et les entreprises d’économie sociale.

Québec et Canada. Programmes de crédits et Financement de transition. Assurer les liquidités des entreprises par des prêts spéciaux d’Investissement-Québec, la Banque de développement du Canada (BDC) et Export Développement Canada (EDC). Certains de ces prêts pourraient être convertis en subvention au Québec.

  • Québec et Canada. Garanties de prêt pour les PME
  • Canada. Crédits à l’exploitation et des prêts à terme sur capacité d’autofinancement;
  • Canada. Programme de prêts conjoints avec des banques commerciales pour les PME
  • Québec. Mesures d’assouplissement aux modalités de prêts déjà consentis par Investissement Québec;
  • Québec. Moratoire de six mois pour le remboursement (capital et intérêts) des prêts déjà accordés par l’entremise des fonds locaux d’investissement (FLI).

Canada. Nouveau Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Prêts sans intérêt pouvant atteindre 40 000 $ aux petites entreprises et aux organismes à but non lucratif afin de les aider à couvrir leurs coûts d’exploitation pendant une période où leurs revenus ont été temporairement réduits. Un montant de 10 000 $ pourrait être non remboursable, si certaines conditions sont remplies. Admissibilité : avoir versé de 20 000 $ à 1,5 million $ en salaires au total en 2019.


Canada. Loyers. Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial (AUCLC). Prêts et/ou des prêts à remboursement conditionnel, à des propriétaires d’immeubles commerciaux. En retour, ceux-ci abaisseront ou annuleront le loyer d’avril (de manière rétroactive), de mai et de juin des petites entreprises qui sont leurs locataires.


Canada. Banques commerciales. Négociation avec les banques commerciales pour qu’elles soutiennent les PME, et qu’elles soient plus souples dans le remboursement des prêts pendant la crise.


Québec et Canada. Impôts. Report du paiement des impôts provincial (1er septembre) et fédéral (31 août). Pour les entreprises, il s’agit de très gros montants d’argent qu’ils pourront utiliser à court terme comme liquidités.


Québec et Canada. Report des versements de la TPS, TVQ et des droits de douane.

  • Report jusqu’au 30 juin les versements de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH), ainsi que les droits de douane à l’importation exigibles;
  • Report des versements de la taxe de vente (TVQ) jusqu’au 30 juin 2020;
  • Québec. Report de paiement des droits annuels d’immatriculation au Registraire des entreprises jusqu’au 1er septembre prochain.

Canada. Subvention salariale temporaire de 10% Permettra aux employeurs admissibles de réduire le montant des retenues à la source à remettre à l’Agence du revenu du Canada. Employeurs admissibles :

  • particulier (excluant fiducie)
  • société de personnes
  • organisme sans but lucratif
  • organisme de bienfaisance enregistré; ou
  • société privée sous contrôle canadien admissible à la déduction accordée aux petites entreprises;
  • avez un numéro d’entreprise et un compte du programme de retenues à la source existant auprès de l’ARC le 18 mars 2020; et
  • payez un salaire, des traitements, des primes ou toute autre rémunération à un employé admissible.

Canada. Prolongation de la durée maximale du programme de Travail partagé, qui passe de 38 semaines à 76 semaines. Le programme de Travail partagé est offert aux travailleurs qui acceptent de réduire leurs heures de travail normales en raison de nouvelles circonstances indépendantes de la volonté de leurs employeurs touchés par la COVID-19.


Canada. Hypothèques. Programme d’achat de prêts hypothécaires assurés (PAPHA). Le gouvernement fédéral achète des  blocs de prêts hypothécaires assurés par l’entremise de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, afin de stabiliser la capacité des banques commerciales à soutenir les hypothèques.


Canada. Entreprises novatrice en démarrage. Aide de 250 millions de dollars aux entreprises novatrices qui sont en démarrage et qui n’ont pas accès aux mesures de soutien actuelles de la COVID-19 destinées aux entreprises.  


Canada. Emplois étudiants. Modification temporaire du programme Emplois d’été Canada. Permettra aux employeurs de:

  • recevoir une subvention salariale accrue, de sorte que les employeurs des secteurs privé et public puissent également recevoir jusqu’à 100 pour cent du salaire horaire minimum provincial ou territorial pour chaque employé;
  • prolonger la date de fin d’emploi pour le 28 février 2021;
  • adapter leurs projets et activités professionnelles;
  • embaucher du personnel à temps partiel.

Canada. Emplois étudiants. Programme de stages pratiques pour étudiants.

Effets économiques du confinement Covid-19

Envoye à maison? Envoye les liquidités!

Mise à jour du jeudi 26 mars 2020

Résumé des mesures économiques des Gouvernements du Québec et du Canada contre la crise économique de la Covid-19 et explications.

Tant qu’à rester tous confinés à la maison, pourquoi ne pas saisir cette occasion pour mieux comprendre l’économie? Je profite donc de notre confinement collectif pour vous offrir dans les prochains jours quelques nouveaux billets sur mon Blogue économique pour faire le point sur la situation, en profitant de ces textes pour vulgariser et expliquer des principes économiques généraux avec des exemples simples et concrets.

  • Prochain blogue : les gouvernements ont-ils les marges de manœuvre financières nécessaires pour lutter contre la crise du Covid-19?

Dans mon précédent Blogue économique, j’ai détaillé les conséquences économiques de la crise de la Covid-19. J’expliquais en quoi la crise actuelle ne ressemble en rien à une récession « normale ».  A la fois plus grave et plus aigüe qu’une crise économique standard, c’est une essentiellement une crise de liquidités

Elle appelle donc des mesures gouvernementales bien différentes, qui nous touchent toutes et tous, individus et entreprises. Tous les détails dans ce billet de blogue.

« Envoye à maison » !

Habituellement, l’objectif du gouvernement en temps de crise économique est de relancer la consommation des individus et les investissements des entreprises. On souhaite que les entreprises embauchent, que les chômeurs trouvent un travail et que les consommateurs reprennent leurs dépenses. On veut « re-booster » l’économie.

Mais, dans la crise de la Covid-19, le gouvernement demande exactement le contraire : restez à la maison! Le Québec est « sur pause » économiquement. C’est une obligation sanitaire.

Cet isolement social force les commerces et les restaurants à fermer leurs portes. Les entreprises tournent au ralenti. Tout cela affecte leurs sous-traitants et fournisseurs, qui, à leur tour, réduisent leurs commandes chez leurs propres sous-traitants/fournisseurs, et ainsi de suite. De même, les individus ont moins de revenus, et ils coupent dans leurs achats, ce qui affecte les entreprises, puis leurs sous-traitants/fournisseurs, et ainsi de suite. C’est un cercle vicieux.

Ce confinement qui nous est imposé est exactement le contraire d’une stratégie de relance de l’économie.

Avec ce ralentissement des affaires, les entreprises perdent des revenus et elles risquent donc de ne pas avoir suffisamment de liquidités, c’est-à-dire suffisamment d’argent pour pouvoir payer leurs employés et leurs sous-traitants/fournisseurs. Résultats : des milliers d’entreprises risquent de faire faillite.

Aussi, des millions de personnes se retrouvent avec moins de revenus et les mises à pied se succèdent. Tous ces gens risquent aussi de manquer de liquidités, c’est-à-dire ne pas avoir suffisamment d’argent pour payer leurs factures, leur loyer, leur hypothèque. Cela les fragilise financièrement.

La crise de la Covid-19 en est une de liquidités

Effets économiques du confinement Covid-19

 « Envoye les liquidités » !

Alors, comment lutter contre cette crise très particulière? En garantissant des liquidités aux entreprises et aux individus. Les deux niveaux de gouvernement (Québec et Ottawa) ont mis en œuvre des mesures économiques draconiennes en ce sens. Le tableau ci-dessous résume tout.

 

Pour les individus

 

Allocations spéciales pour les gens qui restent à la maison, qui n’ont pas le droit à une assurance-emploi.  Rester en confinement chez soi signifie pour des milliers de personnes des pertes de revenus. Pour soutenir ces gens, afin qu’ils puissent avoir les liquidités nécessaires pour payer leurs factures et subvenir à leurs besoins. C’est aussi une façon de convaincre financièrement les gens de rester à la maison et qui autrement seraient réfractaires aux mesures de confinement, justement par crainte de manque de liquidités. Voici les trois principales :

  1. Québec. Programme d’aide temporaire aux travailleurs (PATT COVID-19): Aide financière pour répondre aux besoins des travailleurs qui, en raison d’un isolement, ne peuvent gagner en totalité leur revenu de travail et qui ne sont pas admissibles à un autre programme d’aide financière ou une assurance privée. 573 $ par semaine, pour une période de 14 jours d’isolement, jusqu’à un maximum de 28 jours. Pour les gens qui :
      • ont contracté le virus ou présentent des symptômes;
      • ont été en contact avec une personne infectée; reviennent de l’étranger.
  1. Canada. Nouvelle prestation canadienne d’urgence. Prestation imposable de 2 000 $ par mois pendant quatre mois au maximum, pour :
  • les travailleurs qui doivent cesser de travailler en raison de la COVID‑19 et qui n’ont pas accès à un congé payé ou à une autre forme de soutien du revenu;
  • les travailleurs qui sont malades, qui sont mis en quarantaine ou qui prennent soin d’une personne malade atteinte de la COVID‑19;
  • les parents travailleurs qui doivent rester à la maison sans salaire pour s’occuper d’enfants qui sont malades ou qui ont besoin de soins supplémentaires en raison des fermetures d’écoles et de garderies;
  • les travailleurs qui ont encore leur emploi, mais qui ne sont pas payés parce qu’il n’y a pas suffisamment de travail en ce moment et que leur employeur leur a demandé de ne pas venir travailler;
  • salariés et travailleurs autonomes, y compris les travailleurs à contrat, qui ne seraient pas admissibles par ailleurs à l’assurance-emploi.

La Prestation canadienne d’urgence sera accessible par l’intermédiaire d’un portail Web sécurisé du gouvernement fédéral dès le début du mois d’avril. Pour faire une demande, une ligne téléphonique automatisée et un numéro sans frais seront également mis à la disposition des demandeurs. Tous les détails ici.

Canada. Baisse d’impôts. Baisse d’impôt immédiate d’au moins 580$ pour tout contribuable qui remplit une déclaration de revenu.

Québec et Canada. Report du paiement des impôts. Report du paiement des impôts provincial et fédéral au 31 août. Pour plusieurs personnes, il s’agit de très gros montants d’argent qu’elles pourront utiliser à court terme comme liquidités.

Canada. Hypothèque. Souplesse pour le remboursement des hypothèques garanties par la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL)

Québec et Canada. Moratoire de 6 mois sur le remboursement des prêts étudiants

Canada. Crédits et subvention. Bonification de programmes et de crédits d’impôt pour les particuliers, notamment :

 

Pour les entreprises

 

Québec et Canada. Financement de transition. Assurer les liquidités des entreprises par des prêts spéciaux d’Investissement-Québec, la Banque de développement du Canada (BDC) et Export Développement Canada (EDC). Certains de ces prêts pourraient être convertis en subvention au Québec.

Canada. Banques commerciales. Négociation avec les banques commerciales pour qu’elles soutiennent les PME, et qu’elles soient plus souples dans le remboursement des prêts pendant la crise

Québec et Canada. Impôts. Report du paiement des impôts provincial et fédéral au 31 août. Pour les entreprises, il s’agit de très gros montants d’argent qu’ils pourront utiliser à court terme comme liquidités.

Canada. Subvention salariale de 10% pour inciter les entreprises à garder leurs employés pendant la crise.

 

Tous les détails concernant les mesures fédérales se trouvent ici.

Il y a aussi ce résumé complet et très bien fait du Journal de Montréal, le Petit guide pour les nouveaux chômeurs.

J’ajoute aussi que le Gouvernent du Québec a décidé d’accélérer ses projets d’infrastructure, afin d’injecter dans l’économie des investissements publics en remplacement aux investissements privés en berne des entreprises, et ainsi soutenir l’économie.

La bonne nouvelle

La bonne nouvelle, c’est que l’on sait que la crise est temporaire, le temps « d’aplanir la courbe » du nombre de contamination à la Covid-19. A la fin de cette période de confinement, les gens seront très heureux de pouvoir enfin sortir et magasiner; on risque donc de voir un boom de consommation Les entreprises quant à elles voudront reprendre leurs investissements. D'une certaine façon, l’économie va se relancer par elle-même dans ces conditions quand la fin de la pandémie sera décrétée.

C’est tout le contraire dans une récession normale. Plus l’économie va mal, plus les agents économiques ont un moral en baisse, plus les entreprises diminuent leurs investissements et plus les consommateurs coupent dans leurs achats, donc plus l’économie va mal, et ainsi de suite. Et cela peut s’aggraver ainsi pendant des années.

Mais en attendant la fin de la pandémie, il faut soutenir les individus et les entreprises pendant cette période de crise, par compassion évidemment, mais aussi pour limiter les faillites afin de s’assurer que l’économie de s’écroule pas davantage dans un cercle vicieux qui s’empirerait constamment.

Complément: Pour mieux comprendre les politiques de relance des gouvernements

Quelles politiques en temps de crises « normales »?

Habituellement, les récessions découlent d’un événement grave et négatif qui touche un secteur de l’économie. Les entreprises touchées coupent alors dans leurs productions et leurs investissements, et font des mises à pied. Ce choc initial se propage ensuite à l’ensemble de l’économie, par un mécanisme que j’avais expliqué dans mon dernier blogue.

Mais il encore pire : les « anticipations négatives ». La crise initiale, avec son lot de mauvaises nouvelles, finit par attaquer le moral des agents économiques : le moral des consommateurs qui prendront peur, et le moral des entreprises qui décideront de mettre sur la glace leurs projets d’investissement. Autrement dit, consommateurs et entreprises préfèrent mettre de l’argent de côté pour se constituer un « coussin de sécurité » dans une telle période d’incertitude et de mauvaises nouvelles plutôt que de dépenser dans l’économie.

C’est un cercle vicieux. Plus les entreprises et les consommateurs retardent leurs dépenses, plus l’économie ralentit, plus ils forment des « anticipations négatives », plus ils ont peur, et donc le moral tombe encore plus… Plus ça va mal, plus ça va mal!

Ce n’est pas facile de briser le cercle vicieux des anticipations négatives, et ça peut durer des années. Ça prend des bonnes nouvelles pour que les gens cessent d’avoir des anticipations négatives. C’est de la psychologie… Par exemple, la Grande Crise de 2008 a perduré presque 8 ans!

L’objectif du gouvernement est alors d’essayer de relancer l’économie, en convainquant les consommateurs et les entreprises de reprendre leurs dépenses, et de ramener la confiance et redresser le moral des agents économiques.

L’exemple typique, c’est la mise en œuvre de grands travaux d’infrastructures. Mettons la construction d’un train rapide entre Montréal et Windsor, un projet d’environ 4 milliards $ qui risque de durer de 5 à 7 ans. Cela fait travailler toute une série d’entreprises qui se mettront à réinvestir et réembaucher. Ces réinvestissements ont un impact sur leurs sous-traitants et fournisseurs, qui eux-mêmes passeront de nouvelles commandes à leurs propres sous-traitants et fournisseurs, et ainsi de suite. Ces réembauches assureraient un salaire pour des chômeurs, tout en améliorant les perspectives de revenus pour les personnes déjà employées, et ces gens retrouveront la confiance de consommer davantage. Résultat : les commerces et les restaurants auront plus de revenus, ce qui soutient leurs sous-traitants et fournisseurs, qui à leur tour… et ainsi de suite! C’est pour cela que le Premier ministre, M. François Legault, souhaite accélérer les dépenses du Québec en infrastructure.

Graduellement, l’investissement initial du gouvernement se propagera à l’ensemble de l’économie. Cela devient un cercle vertueux.

Mais avec la Covid-19, on ne peut faire ce genre de stratégie. On veut que les gens restent à la maison… Par contre, la crise du Covid-19 n’est pas liée à des « anticipations négatives » qui minent le moral des consommateurs et des entreprises. Elle est bien réelle et effective.

Surtout, on sait qu’elle est temporaire, le temps « d’aplanir la courbe » du nombre de contamination à la Covid-19. On parle de 3 à 4 mois, peut-être cinq ou six mois, alors qu’une crise normale peut prendre plusieurs années pour se résorber.

Et à la fin de la crise, quand les gens pourront mettre fin à leur confinement, on risque d’observer un boom de consommation et une forte reprise des investissements. L’économie va se relancer par elle-même dans ces conditions.

 

 

Cercle vicieux des anticipations négatives

 

 

 

Politique de relance du gouvernement

Impact économique de la Covid-19

La contagion de la crise économique se fait comme la Covid-19 : de façon exponentielle

Tant qu’à rester tous confinés à la maison, pourquoi ne pas saisir cette occasion pour mieux comprendre l’économie? Je profite donc de notre confinement collectif pour vous offrir dans les prochains jours quelques nouveaux billets sur mon Blogue économique pour faire le point sur la situation, en profitant de ces textes pour vulgariser et expliquer des principes économiques généraux avec des exemples simples et concrets.

• Aujourd’hui : L’impact économique du Covid-19 pour le Québec
• Prochain blogue : Comment lutter contre la crise? La réponse des gouvernements

Vous êtes nombreux à me demander quelles seront les conséquences économiques de la crise de la Covid-19 pour le Québec. Voici un état des lieux.

Avertissement : ce texte pas très joyeux se termine par une excellente nouvelle et une lueur d’espoir. Mais il faut le lire jusqu’au bout pour s’y rendre!

Les impacts économiques de la Covid-19 sont nombreux et graves. Mais tout se résume en un mot : manque de LIQUIDITÉS, c’est-à-dire l’argent disponible des entreprises pour qu’ils puissent payer leurs employés, leurs sous-traitants et leurs fournisseurs, et des individus pour qu’ils puissent payer leurs dépenses courantes. Explications.

Impact économique de la Covid-19

1. Mise à l’arrêt des entreprises et ralentissement de la production

On a demandé à la population de rester à la maison, autant que possible. Plusieurs entreprises pratiquent le télétravail, même si c’est parfois difficile. Mais dans les entreprises manufacturières, la présence physique est nécessaire. La production est donc ralentie ou à l’arrêt. Conséquences : les revenus n’entrent pas et des employés sont mis à pied afin qu’ils puissent recevoir de l’assurance-emploi entre-temps.

Aussi, les sous-traitants et fournisseurs de ces entreprises à l’arrêt ne reçoivent plus de commandes, donc cette situation les ralentit aussi, et vice-versa. Et les sous-traitants/fournisseurs de ces sous-traitants/fournisseurs, à leur tour, sont affectés, ce qui impacte leurs propres sous-traitants/fournisseurs, etc… et cela se propage à l’ensemble des entreprises, de façon exponentielle.

Évidemment, la plupart de ces entreprises manufacturières finiront par honorer leurs contrats et les demandes de leurs clients lorsque la pandémie prendra fin. Mais en attendant, les revenus n’entrent pas, et certaines entreprises auront des difficultés à payer leurs employés et leurs fournisseurs. Elles manqueront de liquidités, risquant pour certaines la faillite.

2. Tourisme et culture

C’est une véritable hécatombe dans le domaine touristique et culturel. Avec les restrictions de voyage et le confinement, les activités touristiques sont à l’arrêt. On pense aussi aux compagnies aériennes qui risquent de perdre énormément d’argent.

Dans le domaine culturel, tout est annulé. Quelle catastrophe, surtout pour les artisans du milieu qui vivaient déjà, en temps normal, avec des moyens financiers précaires. Et comme je l’expliquais, pour les entreprises manufacturières, c’est l’ensemble de la filière qui sera affectée, avec des impacts sur leurs sous-traitants et fournisseurs, et ainsi de suite. Lorsque des événements touristiques, culturels ou sportifs sont carrément annulés (et non pas reportés), ce sont des pertes nettes de revenus qu’il ne sera jamais possible de retrouver. Ce manque de liquidité risque de fragiliser certaines personnes.

3. Commerce international

Les restrictions de voyage ainsi que la fermeture des frontières perturbent fortement le commerce international. Certes, les marchandises peuvent toujours franchir les frontières. Mais il est extrêmement difficile de faire des affaires à l’étranger sans pouvoir voyager : impossible de détecter des opportunités d’affaires, de négocier et signer des contrats, de faire le suivi à la clientèle et l’installation des appareils, etc. Aussi, le Québec n’exporte pas que des marchandises. Il exporte aussi des services et des expertises qui requièrent parfois une présence physique… Tout cela n’est plus possible.

4. Investissement

Pour une entreprise, investir signifie dépenser.

• Investir dans des nouvelles machines = acheter des machines
• Investir en recherche et développement = acheter des équipements spécialisés et rémunérer des chercheurs
• Investir en publicité = dépenses dans une campagne de marketing,
• Etc.

Or, quand l’économie va mal, les entreprises développement des « anticipations négatives », c’est-à-dire une vision négative de ce que seront les opportunités d’affaires dans le futur.

Résultat : plutôt que d’investir, elles voudront plutôt se constituer un « coussin de sécurité », c’est-à-dire mettre l’argent de côté pour parer à une crise. Les projets d’investissement sont mis sur la glace dans l’attente de jours meilleurs. Mais en attendant, c’est le manufacturier d’équipements spécialisés qui ne reçoit pas la commande, ce sont des chercheurs en R&D qui ne sont pas embauchés, c’est l’agence de marketing qui perd un contrat, et bien d’autres. Et l’impact se prolonge sur leurs propres sous-traitants/fournisseurs qui… vous connaissez maintenant l’histoire!

5. Consommation en baisse

Des entreprises à l’arrêt, des travailleurs autonomes qui ne travaillent pas, des artistes dont les événements ont été annulés, des employés licenciés… Autant de personnes qui devront ajuster leur consommation à la baisse dans les prochaines semaines. Résultat : impacts majeurs sur les commerces qui subissent des pertes de revenus, moins de liquidités, donc plus grand risque de faillite.

Cela est évidemment aggravé par la fermeture des restaurants, bistros et bars, ainsi que de nombreux commerces de proximité, qui aussi risquent aussi la faillite…

Avec toujours, pour tous ces commerces, des conséquences sur leurs propres sous-traitants/fournisseurs qui… etc.

6. Baisse des prix des actions en bourse

C’est sans surprise qu’avec toute cette situation économique, les bourses mondiales soient fortement en baisse. Si vous avez des actions ou des fonds de placement, vous en subissez les conséquences! Les gens auront l’impression d’être moins riches, ce qui pourrait les inciter à consommer moins. On revient aux points précédents : consommation en baisse et anticipations négatives des investisseurs.

Et la bonne nouvelle?

La bonne nouvelle, c’est que l’on connaît approximativement la fin de l’histoire. Avec les données épistémologiques sur la Covid-19, et voyant ce qui se passe en Chine, on peut dire que la crise durera environ trois à quatre mois, peut-être cinq. Oui c’est long, mais quand les gens reviendront au travail, l’économie reprendra.

Ça paraît long, 3-4 mois. Mais contrastons avec une crise économique normale. Habituellement, une récession débute par un événement négatif, les bourses qui s’écroulent par exemple. Puis, les entreprises et les investisseurs forment des « anticipations négatives » qui les incitent à mettre sur la glace leurs investissements. Donc, moins de dépenses, ce qui affecte des sous-traitants/fournisseurs, qui ont un impact sur leurs propres sous-traitants/fournisseurs, et cela se propage à l’ensemble de l’économie.

C’est un cercle vicieux. Plus les entreprises retardent leurs investissements, plus l’économie ralentit, plus les investisseurs forment des « anticipations négatives », plus ils ont peur d’investir… Plus ça va mal, plus ça va mal!

Pour résoudre une crise normale, ça prend des bonnes nouvelles pour que les gens cessent d’avoir des « anticipations négatives ». Ce n’est pas facile de briser le cercle vicieux des anticipations négatives, et ça peut durer des années. La Grande Crise de 2008 a perduré presque 8 ans!

Mais avec la crise de la Covid-19, on connait la fin de l’histoire à l’avance. On sait, à un ou deux mois près, quand tout cela va se terminer.

Actuellement, les gens en confinement dépensent moins car ils ne peuvent pas sortir. Quand cela prendra fin, il y aura un boom de consommation qui risque de relancer l’économie.

Et les entreprises pourront reprendre leur production, et elles auront besoin de refaire des commandes à leurs sous-traitants/fournisseurs.

Et là, ça sera un cercle vertueux, le contraire du cercle vicieux des anticipations négatives : plus de consommation et plus de contrats, plus d’entrées d’argent, plus de contrats et de consommation, plus d’anticipations positives, plus d’investissements, plus de dépenses, plus de consommation et plus de contrats, etc.

D’ici là, le gros problème, c’est le manque de liquidités. Pour les individus et pour les entreprises, comment survivre à ces trois à quatre mois avec de telles pertes de revenus? Certains devront faire faillite malheureusement.

C’est sur ce problème de manque de liquidité que les gouvernements doivent impérativement et urgemment intervenir, pour soutenir les entreprises et les individus en état de fragilité financière. On en parle demain dans mon prochain Blogue économique.

Prochain blogue : Comment lutter contre la crise? La réponse des gouvernements

Des baisses d’impôt? Oui peut-être, mais pas maintenant!

Baisse d'impôt

Le Québec vit une période très particulière qui devrait inciter le gouvernement à conserver ses marges de manœuvre budgétaires.

Ce Blogue économique est publié conjointement dans le journal de rue La Galère et sur ce site, dans le cadre d’une nouvelle collaboration. 

Un regroupement de personnalités de la Mauricie et d’ailleurs me demandait récemment mon appui pour la publication d’une lettre ouverte dans laquelle il dénonce la baisse d’impôt de 278 $ par travailleur annoncée par le gouvernement du Québec en novembre dernier. Bien que d’accord avec ce constat, j’avais cependant une perspective différente sur le sujet. Mon argument a trait au mauvais « timing » de ces baisses d’impôt, et non pas sur son principe général.

En effet, peu importe que l’on soit idéologiquement pour ou contre, la première question que l’on doit se poser est : est-ce le bon moment de réduire les impôts? Considérant la conjoncture économique actuelle, le gouvernement du Québec aurait tout intérêt à conserver des marges de manœuvre financières pour pouvoir faire face à quatre défis budgétaires : vieillissement de la population, financement des infrastructures, crise économique et dette publique. Ce sont des problématiques conjoncturelles certes, mais qui impliquent des dépenses importantes dans les années à venir.

Vieillissement. On le sait, la génération des baby-boomers part graduellement à la retraite. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il y a eu une très forte augmentation des naissances jusqu’en 1965 environ. D’où l’expression « boom de bébés » (baby-boomers). Le taux de natalité a par la suite chuté au cours des périodes qui ont suivi.

Ce qui fait qu’aujourd’hui, on note un débalancement démographique important. Le nombre de personnes actives (la population en âge de travailler) est de plus en plus faible par rapport aux retraités. En 1971, on comptait neuf individus de 15-64 ans par personne retraitée. Aujourd’hui, ce ratio est tombé à trois. Résultat : le poids du financement des retraites devient de plus en plus lourd par personne active. De plus, puisque les baby-boomers vieillissent, on constate une proportion plus grande de personnes ayant des besoins en services de santé et autres services sociaux. Ce débalancement démographique va se résoudre, par lui-même, avec le temps. En attendant, il faut quand même assurer cette hausse inévitable des dépenses…

Infrastructures. Au Québec, une très grande majorité des infrastructures ont été construites pendant la « Révolution tranquille » entre 1960 et 1970 : routes, ponts, écoles, etc. Évidemment, aujourd’hui en 2018, après presque 60 ans, ces infrastructures ont sérieusement besoin d’entretien ou de renouvellement. On pense au pont Champlain en train de littéralement se décomposer. Ou la plupart des viaducs du Québec, tel que le signalait en 2006 une commission parlementaire. Ou des écoles primaires infectées de moisissures. Et on ne parle pas des besoins d’investissements dans de nouvelles infrastructures : réseaux de transport en commun, trains rapides, etc.

Le Québec se situe en ce moment dans un cycle de modernisation et de renouvellement de ses infrastructures. C’est très coûteux, et nous en avons encore pour quelques années. Mais ce sont des investissements essentiels pour la qualité de vie des gens, mais aussi pour la compétitivité économique du Québec.

Remboursement de la dette. Le gouvernement du Québec vient de dégager des surplus budgétaires, une première depuis 10 ans. Malgré tout, la dette publique combinée des gouvernements fédéral et provincial se situe à 83,7% du PIB selon l’Institut Fraser. C’est inquiétant pour plusieurs raisons. J’en donne deux. Premièrement, les paiements d’intérêts sur la dette sont gigantesques : 62,3 milliards de dollars par année. Cet argent pourrait contribuer à financer des services publics plutôt que les coffres des institutions financières. Deuxièmement, sur le plan des principes, c’est une forme d’iniquité générationnelle puisque l’on repousse des dépenses d’aujourd’hui sur le dos des prochaines générations. Plutôt que des baisses d’impôt, le gouvernement pourrait songer à rembourser sa dette.

Certains diront que la dette n’est pas une réelle préoccupation et qu’il faut plutôt investir dans la société. Très bien, mais pour ce faire, d’une façon ou d’une autre, il faut conserver les revenus du gouvernement!

Crise économique. La crise économique de 2008-2009, l’une des plus graves depuis la Grande crise de 1929, a plongé le budget de tous les gouvernements occidentaux dans des déficits gargantuesques. Ce que cette crise nous a enseigné, c’est qu’un gouvernement doit conserver des marges de manœuvre budgétaires pour faire face aux prochaines difficultés économiques.

Si un budget est au déficit zéro avant une crise, le gouvernement s’en félicite, mais il risque de se retrouver avec un déficit de -2% ou -3% du PIB avec la crise. Par contre, si un gouvernement prévoyant ajuste ses finances pour qu’en temps normal, le budget dégage un surplus de 2% ou 3%, il se retrouvera au déficit zéro au pire de la crise! S’il n’y a pas de crise, le gouvernement aura le loisir d’utiliser son surplus. C’est le même principe qu’une famille qui conserve un petit coussin de sécurité pour couvrir les imprévus financiers.

Après 10 ans, l’économie mondiale vient à peine de s’en sortir. Mais avec toute l’incertitude actuelle sur le plan de l’économie mondiale et de la géopolitique, qui sait quand arrivera la prochaine crise? Les finances publiques du Québec restent fragiles malgré les récents surplus budgétaires. Le gouvernement ne peut se permettre d’offrir des cadeaux fiscaux dans ces conditions.

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Il y a de bonnes raisons de vouloir baisser les impôts : donner aux entreprises de la marge financière pour investir, et aux contribuables plus de moyens pour consommer, etc. Et il y a des arguments pour augmenter les impôts : lutter contre la pauvreté, réduire les inégalités sociales, etc.

L’objectif ici n’est pas de prendre position. Au-delà du débat gauche-droite, il faut songer au « timing » des baisses d’impôt. Si on est d’accord en principe, est-ce vraiment le bon moment, en pratique, dans cette période très particulière pour le Québec?