SAQ: des prix très élevés!

Des prix plus élevés!

Les prix du vin à la SAQ sont TRÈS élevés. Ce n’est pas mon principal argument pour libéraliser le marché de la SAQ. Mais c’est une question qui revient souvent dans l’actualité. On va tenter de le démontrer ici.

Décomposition du prix du vin

Le graphique ci-dessous montre la décomposition du prix d’un vin à la SAQ (source: Rapport d’activité de la SAQ). Prenons par exemple un vin vendu au prix de 15,95$. La SAQ achète le vin au producteur à un coût de 5,43$ (incluant le transport!). Il faut ensuite ajouter 3,22$ de taxes: TPS, TVQ, droits de douane et autres taxes. Ça fait un total 8,65$. Or, le vin est vendu à 15,95$. Ceci signifie que la marge brute de la SAQ est de 84%! C’est énorme! On verse donc au gouvernement non seulement 3,22$ de taxes diverses, mais une marge de 84% en plus!

Mettons que le coût de distribution de la SAQ est de 2$ (ce qui est très élevé: les supermarchés me disent que ça leur coûte environ 1$ la bouteille en coût de distribution). Ajoutons une marge de profit de 30% (ce qui est généreux dans la distribution alimentaire). 8,65$+2$+profit 30% = 13,85$. C’est 2$ de moins que la SAQ.

Et c’est un calcul très conservateur: de nombreux producteurs en Europe et au Québec m’ont confirmé que la marge brute de la SAQ est plutôt de 145% en moyenne!!

Repartion Prix

Ontario

J’ai comparé 207 produits entre la SAQ et la LCBO en Ontario. La LCBO est aussi un monopole qui a la capacité de maintenir des prix élevé. Malgré cela, la très grande majorité des produits sont moins chers en Ontario. La différence de prix est en moyenne de 10%, mais pour les vins de moins de 15$, la différence montre à 13%.

Prix Ontario

Cliquez ici pour voir l’ensemble des données pour l’Ontario.

Le vin moins cher en Ontario, prouve un chercheur, Le Soleil.

SAQ : les vins beaucoup plus chers au Québec qu’ailleurs, Canal Argent.

Alberta

L’Alberta est un cas particulier car le système y est totalement libéralisé. J’ai refais la même comparaison de prix avec le Québec pour 93 produits. En moyenne, les prix sont plus bas en Alberta de 0.74%, ce qui est très peu. Mais avec le boom économique du pétrole, le niveau des prix (inflation) en Alberta a fortement augmenté dans les 15 dernières années, beaucoup plus qu’au Québec ou en Ontario. Un loyer à Calgary est devenu beaucoup plus cher qu’à Montréal par exemple. Comme le vin est maintenant vendu par des entreprises privées, celles-ci ajustent le prix des vins au coût de la vie qui augmente fortement. J’ai donc recalculé les différences de prix en tenant compte de ce coût de la vie. La différence de prix est alors de 16%.

Prix Alberta

Pour montrer que je ne suis pas en train de trafiquer les statistiques avec cette histoire de coût de la vie, dans le graphique ci-dessous, on voit que l’augmentation des prix du vin (premier graphique du haut) coïncide avec l’augmentation des prix des logements en Alberta (deuxième graphique). Lorsque l’on corrige les prix dans chacune des provinces pour l’inflation (troisième graphique), on voit que les prix sont plus bas en Alberta (Source: Statistique Canada, Tableau 326-0020 Indice des prix à la consommation).

IPC Vin Alberta1
IPC Logement Alberta1

IPC réel Vin Alberta1

Cliquez ici pour voir l’ensemble des données pour l’Alberta.

États-Unis

La comparaison avec les États-Unis est beaucoup plus difficile car il existe des milliers de distributeurs et boutiques et c’est très long de répertorier tous les prix. J’ai donc une comparaison avec seulement 24 produits. Cependant, la différence de prix est éloquente: le vin est 37% moins cher aux États-Unis!

Prix EtatsUnis

Belgique

Comme je l’explique dans mon livre « Où sont les vins », la comparaisons entre le Québec et l’Alberta (ou le reste du Canada) n’est pas appropriée, le consommateur québécois ne ressemblant en rien au consommateur de l’Alberta quant aux goûts et aux habitudes culturelles envers les vins et alcools. Comparons des pommes avec des pommes, et des oranges avec des oranges. J’opte plutôt pour une comparaison entre le Québec et la Belgique, par leurs similitudes culturelles et linguistiques, et notamment en ce qui concerne la demande pour les vins. J’ai enfin fait une petite comparaison avec le prix de 24 vins d’Alsace vendus en Belgique. Ces vins sont 25% moins chers en Belgique.

Prix Belgique

TRUMP et l’économie: un pont vers le passé

TRUMP et l’économie: un pont vers le passé

Quelles conséquences pour l’économie américaine, québécoise et canadienne?

TrumpUn politique visionnaire est habituellement celui qui présente un projet proposant de propulser la société vers les réalités de demain, un pont vers le futur, dans un effort d’adapter le pays aux grands changements qui modèlent le monde moderne et d’offrir une vision optimiste de l’avenir.

Donald Trump – le nouveau Président-désigné des États-Unis – propose l’exact contraire. Son programme économique est un véritable pont vers le passé.

Les mots innovation et technologies n’apparaissent pratiquement pas dans sa plateforme économique; il propose un retour aux énergies polluantes, telles que le pétrole et le charbon; il cherche à créer des emplois par le protectionnisme, en isolant les États-Unis des marchés mondiaux, plutôt que travailler à renforcer la compétitivité des entreprises américaines, la productivité, la créativité, l’innovation, la R&D, l’entrepreneuriat, l’éducation et la formation de la main-d’œuvre (tous des thèmes encore une fois pratiquement absents de son programme).

Les innovations du futur demandent des investissements dès aujourd’hui. En investissant plutôt dans les technologies du passé, Trump risque de mettre en péril l’avance technologique  américaine dans les 10 prochaines années.

Et dans l’état, les politiques économiques qu’il défend risquent de mener à une catastrophe économique pour les États-Unis, le Québec, le Canada et à la planète entière.

Petit survol de la catastrophe attendue.

  1. Incertitudes, investissements et ralentissement économique

J’ai comparé la plateforme économique de Donald Trump (https://www.donaldjtrump.com/policies/economy) avec celle d’Hillary Clinton (https://www.hillaryclinton.com/issues/). Je résume les deux programmes dans la figure ci-dessous.

plateformes-economiques-elections-us-2016

« Le Donald » offre un programme minimaliste, avec quelques grandes propositions très générales, peu de détails et beaucoup de flou.

Pour tout dire, on a l’impression qu’il a été rédigé par un étudiant de CÉGEP à trois heures du matin pour un travail de session dans un cours d’économie!

Les milieux économiques redoutent avant tout l’inconnu et l’incertitude. Ils peuvent s’opposer à une politique particulière, mais si elle est annoncée bien à l’avance, les entreprises s’adapteront en conséquence.

Les entrepreneurs, lorsqu’ils veulent mettre en œuvre un projet d’investissement, font face à des risques et des incertitudes. Est-ce que la demande sera encore présente dans le futur? Les coûts de production augmenteront-ils? Et le pétrole? Et les taux d’intérêt? La réglementation va-t-elle changer? La croissance économique sera-t-elle au rendez-vous?

Avec Trump, il est non seulement difficile de comprendre son plan économique, mais en plus, on se perd en conjoncture à savoir s’il l’appliquera ou pas!

Devant cette incertitude, les entreprises risquent de décider de reporter leurs investissements. Tout investissement représente une dépense qui fait « rouler l’économie ». Si les entreprises reportent leurs investissements, cela peut donc avoir un effet négatif sur la croissance économique américaine et mondiale.

Un ralentissement économique américain risque de tuer le peu de reprise économique que nous avions notée aux États-Unis dans les derniers mois.

Et cela risque aussi d’affecter le Canada et le Québec, car si les entreprises américaines dépensent moins, il y a des exportateurs ici qui vont en pâtir…  Comme le dit l’adage, quand les États-Unis ont le rhume, le Canada éternue…

  1. Protectionnisme

La principale politique économique de Donald Trump, c’est le protectionnisme. Retrait (ou renégociation?) de l’ALÉNA (le traité de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique), impositions de tarifs douaniers de 35 à 45% sur les produits chinois et mexicains, refus du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP), etc.

En fermant les frontières, Trump pense protéger les entreprises américaines, et donc les emplois. Mais rien n’est moins sûr.

Le commerce international, c’est comme un tango. Ça se danse à deux. Si les États-Unis imposent un tarif douanier de 45% sur les produits chinois, le gouvernement chinois fera de même avec les produits américains.

Pour les consommateurs américains, cela représente une hausse de prix de 45% sur tout ce qui provient de la Chine. Le magasin à 1$, qui vend essentiellement des bébelles fabriquées en Chine, va devenir un magasin à 1,45$! C’est une perte de pouvoir d’achat pour le consommateur.

Pour les entreprises américaines, la Chine est un marché de 1,8 milliards de personnes, avec une croissance économique de 7% annuellement. C’est une destination incontournable pour les entreprises américaines. Les représailles chinoises risquent d’affecter gravement toutes les entreprises américaines qui exportent dans ce pays, mettant en péril des milliers d’emplois.

Mais ce n’est pas tout! Les entreprises américaines importent de la Chine toutes sortes de composantes, de machineries spécialisées, de ressources et d’intrant. Mais avec une taxe de 45% sur les importations chinoises, cela signifie une hausse de coûts d’approvisionnement pour ces entreprises.  Elles deviendront alors moins compétitives, ce qui – ironiquement – risque de diminuer leur capacité à exporter.

Et qui paiera la note? Soit les consommateurs avec des hausses de prix, soit les emplois lorsque les entreprises voudront compenser la hausse de coûts en réduisant la masse salariale.

Et – deuxième ironie – qui sont les travailleurs américains risquant d’être le plus affectés? Les travailleurs ayant un faible niveau d’éducation, précisément ceux qui ont voté pour Trump!

Les États-Unis sont de loin le principal partenaire commercial du Canada. Près de 70% des exportations des entreprises québécoises se dirigent vers notre voisin du Sud. Ce protectionnisme Trumpesque et la remise en question du traité ALÉNA risquent de mettre en péril le marché de plusieurs milliers d’exportateurs québécois et canadiens.

  1. Baisse des impôts et dette publique

Autre grande mesure Trumpesque, une importante réduction d’impôts pour les particuliers et pour les entreprises. Trump pense qu’en dégageant plus d’argents pour les contribuables, cela va les inciter à consommer davantage, donc à relancer l’économie. Et en diminuant l’impôt des entreprises, cela contribuera à les inciter à rester aux États-Unis plutôt que de s’installer dans des pays à bas salaire.

Cette logique n’est pas entièrement fausse.

Mais l’ampleur de la réduction des impôts est telle par rapport à la faible efficacité de cette mesure qu’elle risque surtout de creuser le déficit budgétaire du gouvernement américain. En se privant de ces revenus, l’État va devoir emprunter encore plus sur les marchés financiers, avec en bout de ligne un endettement grandissant. Or, le gouvernement américain est déjà en déficit budgétaire depuis plusieurs années.

En réponse à cet accroissement de la dette publique, l’administration Trump se verra dans l’obligation de couper dans les dépenses. Et cette austérité budgétaire risque de frapper les plus faibles, et particulièrement les électeurs de Trump. Troisième ironie!

Surtout, l’austérité budgétaire risque d’affaiblir le peu de croissance économique aux États-Unis.

Il est maintenant démontré que les baisses d’impôts sont assez peu efficaces pour relancer une économie, d’autant plus que le plan Trump favorise disproportionnément les contribuables les plus riches. Les exemples des baisses d’impôts des riches sous le président Reagan et W. Bush nous l’ont clairement démontré.

  1. Immigration

Dans tous les pays occidentaux, la principale barrière au développement des entreprises, c’est la pénurie de main-d’œuvre. Au Québec, des milliers d’entreprises doivent refuser des contrats par manque de main-d’œuvre. Il en résulte moins de croissance économique.

La bataille de Donald Trump contre l’immigration risque de perturber significativement le marché de l’emploi aux États-Unis. Cette force de travail est essentielle. Sans elle, on met en péril le développement des entreprises. N’oublions pas que le taux de chômage est très faible aux États-Unis à 4,9%.

L’immigration est aussi un facteur important pour l’innovation. Les immigrants apportent avec eux de nouvelles idées, des savoir-faire, un réseau de contact à l’étranger, des perspectives inédites, etc. C’est une richesse collective immatérielle très importante pour un pays.

Par exemple, à l’Institut de recherche sur les PME, nous avons démontré dans une étude que l’entrepreneuriat était plus fort dans les régions où il y a plus d’immigrants.

Enfin, l’immigration génère un effet macroéconomique bénéfique (voir illustration ci-dessous). Les immigrants travaillent, ce qui leur rapporte un revenu. Ils se mettent donc à dépenser dans le pays, donc augmentation de la demande, les entreprises doivent répondre à cette demande, donc augmentation des ventes, augmentation des profits des entreprises, donc croissance économique.

immigrants-effet-macroeconomique

Il faut donc cesser de voir l’immigration comme un coût. C’est aussi un bénéfice et aussi une richesse.

Pour le Canada, le Québec et le monde: une catastrophe annoncée

Résumons les conséquences économiques négatives du plan Trump :

  1. Une grande partie de ces mesures risquent de ralentir significativement l’économie américaine, voire causer une récession. Un affaiblissement américain devrait, dans son sillage, entraîner l’économie mondiale à la baisse, elle qui est déjà fragile. Ceci est particulièrement vrai pour le Canada qui a des liens commerciaux importants avec les États-Unis
  1. Le protectionnisme commercial américain risque de fortement perturber l’économie du Canada, parce que les entreprises canadiennes auront un accès plus difficile au marché américain, son principal partenaire commercial.

Ouf!